En douze années de pontificat, François a multiplié les gestes forts en direction du continent africain, à travers ses voyages, ses prises de position diplomatiques et ses rencontres avec plusieurs chefs d’Etat.
Le pape François est décédé, à l’âge de 88 ans, au lendemain des célébrations pascales, a annoncé le Vatican. Premier souverain pontife originaire d’Amérique latine, il a marqué son pontificat par un engagement en faveur des plus démunis et une attention particulière à l’Afrique, où il s’est rendu à plusieurs reprises.
Apparu très affaibli lors de son dernier bain de foule sur la place Saint-Pierre durant la semaine pascale, le pape François avait progressivement réduit ses apparitions publiques ces dernières années, en raison de problèmes de santé récurrents. Le Vatican a confirmé que le cardinal camerlingue, Kevin Farrell, assurera l’intérim jusqu’à la tenue d’un conclave, qui devra élire son successeur dans un délai de quinze à vingt jours.
Durant son pontificat, entamé en mars 2013 après la démission de Benoît XVI, Jorge Mario Bergoglio a effectué plusieurs dizaines de voyages apostoliques à travers le monde, dont cinq en Afrique. Il a mis en avant des enjeux chers à de nombreux pays africains, notamment la pauvreté, la justice sociale, les conflits, la migration, la jeunesse, la protection de l’environnement.
Sa première visite sur le continent, en 2015, l’a conduit au Kenya, en Ouganda et en Centrafrique, où il avait notamment ouvert la première porte sainte du jubilé de la miséricorde à Bangui, en pleine période de transition politique. En Egypte, en 2017, il avait tenu un discours pour la paix et le dialogue interreligieux à l’Université Al-Azhar.
En 2019, il s’est rendu au Maroc, à Madagascar, à Maurice et au Mozambique, où il avait appelé à la réconciliation et salué les efforts de paix dans la région. Son dernier voyage en Afrique, en 2023, l’a mené en RDC et au Soudan du Sud, deux pays marqués par des conflits. A Kinshasa, il avait dénoncé l’exploitation du continent et plaidé pour une Afrique respectée. A Djouba, il avait effectué un pèlerinage œcuménique de paix, en présence des chefs des Eglises anglicane et écossaise.
Dans une interview accordée en 2018 à Reuters, il s’était exprimé sur la question de la migration des Africains vers l’Europe. « Nous devons investir en Afrique, mais investir de manière ordonnée et créer des emplois, et non pas y aller pour l’exploiter […]. Lorsqu’un pays accorde l’indépendance à un pays africain, c’est une indépendance superficielle puisque le sous-sol n’est pas indépendant. Et puis les gens (en dehors de l’Afrique) se plaignent du fait que des Africains affamés viennent ici. Il y a des injustices là-bas ! », avait-il indiqué. En 2023, cette position transparaissait dans un autre discours prononcé à son arrivée en RDC. « Ôtez vos mains de la République démocratique du Congo, ôtez vos mains de l’Afrique ! Cessez d’étouffer l’Afrique : elle n’est pas une mine à exploiter ni une terre à dévaliser. Que l’Afrique soit protagoniste de son destin », a-t-il déclaré.
Le pape François a également reçu au Vatican de nombreux dirigeants africains. Ces visites officielles, souvent accompagnées d’échanges sur les défis politiques, sociaux ou humanitaires, ont permis de renforcer les liens diplomatiques entre le Saint-Siège et plusieurs Etats du continent. Parmi les chefs d’Etat reçus figurent Nana Akufo-Addo (ancien président du Ghana), Denis Sassou-Nguesso (Congo), Paul Kagame (Rwanda), Alassane Ouattara (Côte d’Ivoire), Félix Tshisekedi (RDC) ou encore Macky Sall (Sénégal).
Le décès du pontife marque un tournant pour l’Eglise catholique, qui compte plus de 256 millions de fidèles sur le continent africain, selon les données du Vatican. Dans les prochains jours, plusieurs chefs d’Etat, responsables religieux et personnalités d’Afrique devraient lui rendre hommage. L’organisation du conclave pourrait être suivie de près, notamment en Afrique, où les attentes sur la place du continent dans l’Eglise catholique sont de plus en plus affirmées. Une autre question qui sera scrutée est la position de son successeur sur l’homosexualité. La posture plus inclusive du pape François envers les personnes homosexuelles avait suscité des critiques dans plusieurs milieux conservateurs, notamment dans certains pays africains où l’homosexualité reste taboue ou pénalement réprimée.
Louis-Nino Kansoun
Edité par M.F. Vahid Codjia
