La majorité des pèlerins morts lors du hadj qui se termine ce mercredi soir 19 juin à La Mecque, la ville la plus sainte de l’islam dans l’ouest de l’Arabie saoudite, sont de nationalité égyptienne. Le nouveau bilan porte à 922 le nombre total de morts comptabilisés au hadj, selon un décompte de l’Agence France Presse. Selon un diplomate arabe, le nombre de morts égyptiens au hadj est monté à au moins 600 fidèles. « Tous les décès (nouvellement annoncés) sont dus à la chaleur », a-t-il dit à l’AFP, alors que les températures avaient atteint les 51,8°C.
Il est difficile d’avoir une confirmation de ces chiffres, car l’Arabie saoudite fait la chasse aux pèlerins qui n’ont pas de visa, ils n’ont pas accès aux structures officielles de pèlerinage et donc aux espaces climatisés. Officiellement, il n’y a pas de morts à cause des fortes chaleurs en Arabie saoudite, le royaume admet toutefois que des milliers de pèlerins ont été incommodés par la canicule.
Les raisons d’une surreprésentation des Égyptiens parmi les victimes
L’explication donnée officieusement par les responsables égyptiens pour expliquer cette très forte mortalité parmi les pèlerins, rapporte notre correspondant au Caire, Alexandre Buccianti, est la vague de chaleur avec des températures atteignant plus de 50°C à l’ombre. Toutefois, cela n’explique pas pourquoi les Égyptiens qui représentent 5% à peine des pélerins comptent plus de la moitié des morts.
C’est sur les médias sociaux que l’on trouve l’explication. Le coût minimum pour le grand pèlerinage à la Mecque dépasse les quatre années de Smic. Un coût qui a explosé après le Covid-19, mais aussi à cause de la dévaluation spectaculaire de la livre égyptienne. Résultat, beaucoup d’Egyptiens contournent la réglementation du hadj et se rendent en Arabie pour tourisme, soit l’équivalent d’un simple billet d’avion. Ils cherchent ensuite à s’introduire subrepticement à la Mecque. Ceux qui réussissent n’ont ni gîte ni couvert ni couverture médicale, ce qui par grande chaleur et pour les plus âgés peut se révéler mortel.
Scène apocalyptique
Sur les réseaux sociaux, on peut voir des pèlerins allongés à même le sol, au pic du soleil, le visage recouvert d’un drap blanc, rapporte notre correspondant à Riyad, Joseph Clément. Aucune ambulance en vue. Une scène apocalyptique. Les autorités saoudiennes avaient pourtant mis en garde les pèlerins de ne pas sortir au pic du soleil, distribuant eau et glace, préconisant d’utiliser des ombrelles pour se protéger.
Dans les médias saoudiens, le ministre de la Santé s’est félicité de la bonne prise en charge médicale des pèlerins et d’avoir évité les épidémies et les menaces liées aux fortes chaleurs.
Chaque année, des dizaines de milliers de pèlerins tentent d’accomplir le hadj par des voies irrégulières, car ils ne peuvent pas se permettre les permis officiels, souvent coûteux. Outre les morts égyptiens, 60 décès de Jordaniens ont été annoncés par des diplomates arabes. Des décès ont également été confirmés en Indonésie, en Iran, au Sénégal, en Tunisie et au Kurdistan irakien. Un diplomate asiatique a fait état de « 68 décès » parmi les pèlerins indiens.
Lorsque la température interne [du corps humain] dépasse les 40°C, il va y avoir des conséquences sur le cerveau, puis rapidement un délire, des crises d’épilepsie et un coma. Si la température continue à augmenter, le patient va souffrir de perturbations cardiovasculaires, le tout dans un contexte de déshydratation, qui vont le conduire au décès.
Professeur Bruno Megarbane, chef du service de réanimation à l’hôpital Lariboisière, revient sur les effets des températures extrêmes sur le corps humain