L’agitation grandissante autour de la problématique de la diaspora enfle de plus en plus dans les milieux politiques Africaines. D’aucuns pensent que le recours à la diaspora est de bon augure pour résoudre les difficultés d’un pays en proie à de sérieux problèmes économiques et sociaux. Cependant, ces initiatives ne peuvent être bénéfiques que si elles s’accompagnent d’un changement de gouvernance sans précédent. En effet, l’Afrique peut profiter d’externalités technologiques que favorise sa politique d’intégration de la diaspora à condition de développer son propre capital humain. Mais développer le capital humain passe non seulement par des réformes institutionnelles profondes des différents niveaux de formation et d’éducation, mais également par une remise en cause des facteurs de répulsion qui incitent les diplômés et les personnes qualifiées à s’expatrier. Il faut donc faire évoluer de manière conjointe la société et certaines pratiques qui freinent sa vitalité tout en accélérant le processus de réformes.
En ce qui concerne la recherche scientifique, il nous paraît indispensable de l’endogéneiser et de la pérenniser. Ce processus ne peut faire l’impasse sur l’indispensable articulation entre la recherche scientifique, l’université et les entreprises. Il est temps que ces entités qui s’ignorent collaborent et travaillent ensemble. Ces réformes doivent s’accompagner d’une ouverture de plus en plus rapide vers l’extérieur.
Cette ouverture doit se traduire par un encouragement à la délocalisation d’entreprises et surtout de centres de recherche étrangers en valorisant le capital humain existant. Dans le même ordre d’idées, la formation à distance doit être encouragée ainsi que le partage du savoir et des compétences. La création de diplômes de niveaux intermédiaires ou supérieurs (bac + 2 et bac + 3) avec des mécanismes de compensation, à la lumière de ce qui se passe entre pays européens, doit aussi être encouragée.
La diaspora Africaine qui dispose d’un savoir-faire scientifique et industriel doit être mise à contribution de façon active et durable. Cependant, cette ouverture doit éviter, autant que faire se peut, d’imiter les pays développés en matière de sciences et de technologie. Il n’est pas nécessaire de reproduire les mêmes institutions ni les mêmes schémas, et encore moins de s’attendre aux mêmes effets des politiques suivies. La mise en place d’une sorte de “guichet unique” pour s’occuper des affaires de la diaspora nous paraît aussi indispensable.
Chaque année, les membres de la diaspora mondiale envoient plus de 450 milliards d’USD à leurs familles restées dans des pays en développement.Grâce à ces envois de fonds, qui favorisent les investissements, le tourisme, leséchanges, les actions philanthropiques, les transferts de savoirs et les relationstransfrontières, les diasporas jouent un rôle essentiel dans le développement de leurs pays d’origine. Selon les estimations, la part des envois de fonds utiliséeà des fins agricoles dans les zones rurales est relativement modeste – jusqu’à 5 pour cent du montant total – mais représente cependant quatre fois l’aidepublique au développement (APD) mondiale allouée à l’agriculture.
C’est dans les pays en situation de sortie de crise et dans les États fragiles quel’incitation à migrer est le plus fortement ressentie. Dans les pays confrontés àdes catastrophes naturelles, des difficultés économiques et/ou une instabilitépolitique, les diasporas interviennent pour prendre en charge les besoinsquotidiens des membres de leurs familles et sont aussi les premières à réagir encas de situations d’urgence. L’initiative d’appui aux investissements de ladiaspora en faveur de l’agriculture (DIA) vise à développer ce rôle capital que ladiaspora joue sur le court terme, afin de l’aider à avoir le plus fort impactpossible sur le long terme, comme un véritable moteur de développement.Il n’est pas possible d’assurer la croissance économique, de réduire la pauvretéet d’améliorer la sécurité alimentaire sur le long terme sans réaliser desinvestissements significatifs dans le secteur agricole. L’investissement agricoleest indispensable à la croissance rurale, à la création d’emplois, à la satisfactiondes besoins fondamentaux et à l’ancrage solide d’une croissance économiquequi profite à tous les membres de la société.
Loic Gabin K