Les tribunaux camerounais tournent au ralenti, depuis ce lundi 16 septembre, avec de très nombreux reports d’audience, une action symbolique pour cinq jours de mobilisation des avocats contre leurs conditions de travail.
« Mes collègues sont en train de respecter ce mouvement d’humeur avec sérénité. L’ordre des avocats a déployé dans des tribunaux des équipes qui veillent à ce que la grève soit respectée comme il se doit », explique Ebi Standley, membre du bureau de l’Ordre dans la région du Sud-Ouest.
Lors de la session du 31 août dernier, l’Ordre des avocats au Barreau du Cameroun avait débattu «les questions relatives à l’entrave à l’exercice professionnel et aux atteintes physiques contre les avocats», d’après la résolution rendue publique au terme de cette concertation convoquée par Charles Tchakoute Patie, le Bâtonnier de l’Ordre.
L’Ordre avait constaté dans ladite résolution, «….que très souvent, le libre accès des avocats à leurs clients dans les lieux de détention leur est refusé »: citant le secrétariat d’Etat à la Défense (SED), les commissariats de police, les brigades de gendarmerie et les prisons.
Le barreau avait également constaté «que les droits de la défense, consacrés par les lois et les traités internationaux ratifiés par le Cameroun sont, de manière récurrente, violés tant à la phase d’enquête préliminaire qu’à celle d’instruction du jugement ».
A la sortie de la session du 31 août, le conseil de l’Ordre des avocats au Barreau du Cameroun avait décidé « la suspension du port de la robe et de la non-fréquentation des cours et tribunaux sur toute l’étendue du territoire», et ce, pendant 5 jours, du 16 au 20 septembre.
Ce mouvement de grève des avocats du Cameroun pourrait, par ailleurs, prendre d’autres formes au terme de celui qui a débuté ce lundi, «…à l’expiration de cette période, d’autres mesures pourraient être prises, s’il y a lieu », avait prévenu l’Ordre.
Pour tenter de désamorcer cette grève, le gouvernement camerounais avait ouvert le dialogue avec l’Ordre du barreau le 3 septembre.
Le ministre délégué à la Justice, Jean de Dieu Momo, qui avait rencontré les avocats, avait émis le vœu de voir le conseil de l’Ordre des avocats « reconsidérer son mot d’ordre de suspension du 16 au 20 septembre 2019…», en vain.
Dans son analyse, l’économiste camerounais, Triyah Swebu estime que « l’impact de cette grève sera très négatif, non seulement, pour les opérateurs économiques, mais aussi pour les investisseurs étrangers, le gouvernement, etc.»
Swebu juge que « la grève lancée par les avocats vise justement à accomplir une mission inachevée par les grévistes de 2016 ».
Pour rappel, la fameuse crise sociopolitique dans les deux régions anglophones du Cameroun avait débuté fin 2016 par une grève des avocats et enseignants des régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest.
Aujourd’hui, elle est devenue incontrôlable, malgré les multiples appels au dialogue, dont le prochain est prévu à la fin du mois courant.